L’aide exceptionnelle de 6 000 € à l’embauche, créée par le gouvernement et pour encourager l’apprentissage, est maintenue pour les contrats d’apprentissage signés avant le 31 décembre 2024, mais elle ne couvre plus les contrats de professionnalisation signés après le 30 avril 2024. Par ailleurs, les prises en charge des formations ont été réduites : de 10 % pour les diplômes de niveau licence et de 15 % pour ceux de niveau master, plafonnant le soutien à 12 000 €.
Une économie budgétaire de courte vue
Selon Sarah Alves, la baisse des aides à l’embauche en alternance, de 6 000 € à 4 500 €, et la réduction de l’assiette d’exonération des cotisations sociales des apprentis (passant de 0,79 % à 0,5 %) sont autant de mesures visant à alléger les dépenses publiques. Pourtant, « ces réductions pourraient générer des coûts supplémentaires à terme », explique-t-elle. En effet, l’alternance constitue un tremplin vers l’emploi pour de nombreux jeunes, permettant aux entreprises de recruter des talents en formation tout en leur offrant des perspectives de carrière durables.
Sans cette aide, de nombreux jeunes risquent de ne pas trouver de contrat, se tournant alors vers les aides sociales ou le chômage, avertit Alves. « Les petites et moyennes entreprises (PME), qui peinent souvent à recruter sans appui financier, pourraient être particulièrement affectées », ajoute-t-elle. Pour elles, embaucher un alternant sans subvention représenterait un effort financier difficile à soutenir.
Une qualification des jeunes compromise
Au-delà des entreprises, c’est l’ensemble du système de formation et de qualification des jeunes qui pourrait être mis en péril par cette mesure. Sarah Alves rappelle que l’alternance joue un rôle clé pour doter les jeunes de compétences pratiques et de savoir-faire spécifiques aux métiers. « La réduction de l’accès à l’alternance risque d’entraîner une baisse du niveau de qualification de nombreux jeunes », précise-t-elle. Cette diminution des possibilités de formation en entreprise toucherait particulièrement les jeunes issus de milieux modestes, pour qui l’alternance représente souvent une opportunité unique d’accéder aux études supérieures.
Des entreprises et des jeunes en première ligne
La chercheuse note également que les secteurs les plus touchés par cette baisse de subventions seraient ceux qui emploient le plus d’alternants : les PME et les entreprises dans des filières techniques et professionnelles. « Les collaborations entre les entreprises et les établissements de formation, qui favorisent le développement de compétences techniques, risquent de s’essouffler », souligne-t-elle.
Une décision injuste pour les plus vulnérables ?
Pour Sarah Alves, la suppression de ces aides pénalise avant tout les jeunes pour qui l’insertion professionnelle est déjà un parcours semé d’embûches. « C’est une mesure classiste et injuste », déplore-t-elle, ajoutant que l’alternance est souvent un moyen pour les jeunes de se professionnaliser et d’acquérir les qualités indispensables dans le monde du travail, comme la rigueur ou le respect des normes professionnelles.
De plus, pour les jeunes de milieux défavorisés, c’est parfois la seule voie pour financer leurs études tout en se formant. En retirant ce soutien, le gouvernement risque de renforcer les inégalités en matière d’accès à l’emploi et à la qualification.
Vers une révision de la politique d’alternance ?
Cette décision intervient dans un contexte de hausse des coûts de formation et de tension sur le marché de l’emploi des jeunes. De nombreux acteurs, dont des syndicats et des associations de jeunes, appellent le gouvernement à reconsidérer cette mesure pour éviter des répercussions dommageables tant pour les jeunes que pour les entreprises. Tandis que l’alternance a prouvé son efficacité dans la réduction du chômage chez les jeunes, les risques liés à cette suppression de subventions semblent considérables, particulièrement dans un climat économique incertain.
Laura TORTOSA