L’arrivée d’hommes dans le métier d’assistant(e), même timide, suscite déjà de vives discussions. Pour les uns, c’est l’évolution naturelle vers une égalité élargie des genres, pour les autres, c’est l’opportunité de voir cette profession, souvent méconnue et peu valorisée, enfin reconnue à sa juste valeur. L’un des avantages indéniables de cette transformation est l’ouverture des mentalités.
Bruno Loureiro
Assistant de direction et Président FFMAS Paris Île-de-France
Ouverture des mentalités et revalorisation des compétences
Trop souvent, les professions dites « à dominante féminine » ont été associées à une certaine sous-estimation des compétences, comme si la bienveillance, l’organisation ou l’écoute étaient des qualités trop douces, presque secondaires, dans le monde professionnel.
L’arrivée d’hommes dans ce secteur force la société à reconsidérer l’importance de ces compétences. Soudainement, ce qui était perçu comme des « aptitudes féminines » se retrouve regardé sous un autre angle. L’organisation et la gestion de priorités deviennent des talents stratégiques. La capacité à apaiser les conflits internes, autrefois simplement qualifiée de « patience », est maintenant perçue comme une compétence cruciale de diplomatie. Les hommes qui intègrent cette profession offrent, de fait, une légitimité renouvelée à des compétences qui auraient dû être valorisées depuis longtemps.
Vers une rupture des stéréotypes de genre
Autre point positif, souvent sous-estimé, est la rupture progressive avec les stéréotypes de genre. Voir des hommes embrasser des carrières d’assistant(e) permet de s’affranchir d’une vision archaïque des rôles de genre. L’homme, traditionnellement perçu comme un leader naturel, endosse ici un rôle de soutien et d’accompagnement. Cette redéfinition des rôles influence non seulement la perception du métier lui-même, mais aussi celle des personnes qui l’exercent. Il ne s’agit plus d’une profession où l’on sert, mais d’un poste où l’on joue un rôle de facilitateur, de coordinateur et de communiquant, élément essentiel au succès d’une organisation.
Le bénéfice de la mixité dans le métier se mesure également en termes de conditions de travail. L’arrivée d’hommes permet souvent d’élever les standards en termes de reconnaissance salariale et de conditions d’exercice. Le risque, bien sûr, est de voir cette reconnaissance évoluer au profit des hommes tout en laissant les femmes, majoritaires, dans l’ombre. Mais cette tendance pourrait être endiguée par des initiatives claires, visant à garantir que l’égalité salariale soit réelle et que l’évolution des carrières ne dépend pas du genre.
Valoriser le métier d’assistant(e) pour ce qu’il est
Cependant, il est important de préciser que la valorisation accrue de ce métier, avec l’arrivée des hommes, ne doit pas être un prétexte pour imposer des modèles de comportements dits « masculins ». Il ne s’agit pas de transformer l’assistanat pour le rendre plus conforme à une vision stéréotypée de la virilité professionnelle, faite de compétition effrénée et d’autoritarisme. La réelle avancée réside dans la reconnaissance des compétences, qu’elles soient traditionnellement perçues comme masculines ou féminines. Les hommes qui entrent dans ce métier devraient adopter une approche basée sur la collaboration, la subtilité relationnelle, et l’écoute — des qualités qui sont souvent au cœur de la réussite dans ce domaine.
Il est indéniable que la présence masculine dans un métier peut influencer la perception sociale et professionnelle de celui-ci. Mais cela pose également une question : les femmes ont-elles besoin d’hommes à leurs côtés pour que leur travail soit enfin reconnu ? Doit-on vraiment attendre une masculinisation partielle d’une profession pour que l’on en prenne la pleine mesure et que l’on commence à considérer ceux qui l’exercent avec respect et considération ? Il est temps de valoriser le métier d’assistant(e), non parce que des hommes l’intègrent, mais parce que les compétences requises sont fondamentales pour la bonne marche des entreprises et que les femmes, depuis toujours, les portent avec brio.
Enfin, il est crucial que cette ouverture amène à un changement profond de la culture d’entreprise. Au lieu de se contenter d’intégrer des hommes, il faut interroger la valeur accordée aux différents types de compétences, et transformer la manière dont nous envisageons les rôles de soutien. Ce serait un véritable progrès…
Si l’arrivée des hommes peut indéniablement apporter une nouvelle dynamique, il est impératif de ne pas reproduire des inégalités qui existent ailleurs. Comment faire en sorte que l’évolution du métier d’assistant(e) soit un modèle d’équité plutôt qu’une simple réappropriation par les hommes des vertus des femmes ?